Au cœur de l’art photographique, bien avant la retouche numérique, se trouve un concept fondamental et souvent obscur pour le grand public : l’exposition. Loin d’être une simple question de luminosité, l’exposition représente l’enjeu créatif, technique et narratif qui détermine la manière dont une scène est capturée et perçue. C’est l’essence même de l’image, le repère autour duquel s’articule toute composition visuelle. Celle-ci répond à des lois physiques qui sont souvent résumées par le dogme du « triangle d’exposition ». Celui-ci impose au photographe de combiner une ouverture avec une vitesse d’obturation et la sensibilité Iso. L’ajustement concomitant de ces trois paramètres interdépendants permet le juste dosage de la lumière pour fixer un sujet ; lequel peut être parfaitement net ou légèrement flou pour donner une impression de mouvement ou révéler un plan précis de l’image. Ce postulat théorique est souvent source de difficultés pour le néophyte qui peut sembler submergé par ce concept. Toutefois la difficulté augmente quand s’immiscent dans cette règle des critères plus subjectifs qui conditionnent le rendu final d’un cliché. Ils permettent alors à chaque photographe d’exprimer un style narratif qui ne peut se résumer qu’aux strictes règles du triangle d’exposition. L’enjeu de l’exposition dépasse alors la simple justesse technique. Ainsi la narration que veut imposer un auteur peut passer par des choix délibérés de surexposer (High Key pour créer une atmosphère éthérée ou onirique), de sous-exposer (Low Key) pour favoriser les contrastes en vue d’un rendu dramatique voire mystérieux. Les cas de figure sont nombreux et il existe parfois des situations piégeuses ou un sujet sombre survient devant un fond clair. Quoiqu’il en soit, la gestion consciente de l’exposition est ce qui sépare l’instantané commun d’une image unique et très personnelle. Elle est la première décision artistique, le geste inaugural qui donne au spectateur une clé de lecture émotionnelle. L’exposition n’est pas seulement un réglage technique de l’appareil ; c’est la signature visuelle du photographe. Cet épisode souhaite vous permettre d’en prendre conscience et d’oublier parfois les outils de retouche numérique ou autres filtres (preset) qui peuvent certes dépanner, voire sauver une photo, mais en aucun cas vous affranchir d’un rôle actif et déterminé d’auteur.

Bonne écoute !

Photo : © Michel Lion